Sodebo Ultime 3 : 7 marins à la conquête d’un chrono autour du monde !

Dans les prochains jours, l’équipage de Sodebo Ultim 3 emmené par Thomas Coville débutera son stand-by, pour s’attaquer au Trophée Jules Verne, le record du tour du monde en équipage, détenu depuis janvier 2017 par Idec Sport (Francis Joyon) en 40 jours 23 heures 30 minutes et 30 secondes.

 

 

C’est l’un des records les plus convoités de la planète voile, déjà tenté par Sodebo fin 2020. Si l’aventure s’était arrêtée après 16 jours alors que le trimaran était dans les temps du record, le skipper et son fidèle partenaire depuis 25 ans ont toujours gardé cet objectif en tête, conscients qu’il faut savoir persévérer quand cela ne se concrétise pas dès la première tentative. Thomas Coville est un insatiable. Moins d’un an après sa deuxième place sur l’Arkea Ultim Challenge-Brest (course autour du monde en solitaire), le voilà prêt à enchaîner pour un deuxième tour, le dixième de sa carrière.

Pour relever ce sacré défi, le skipper de Sodebo Ultim 3 a choisi de s’entourer de Frédéric Denis, Léonard Legrand, Pierre Leboucher, Guillaume Pirouelle, Benjamin Schwartz et Nicolas Troussel. Afin de préparer cette échéance, l’équipage a beaucoup navigué depuis la remise à l’eau de Sodebo Ultim 3 mi-juin, entre entraînements au large de Lorient et participation aux deux courses du calendrier de la classe Ultim, les 24h Ultim (2e place) et la Finistère Atlantique (3e).

 

Présentation des sept candidats qui vont s’engager dans cette course contre le chrono, doublée d’une véritable aventure humaine.

On ne présente plus le skipper de Sodebo Ultim 3, l’un des marins français les plus expérimentés autour du monde. Entre son premier tour, en 1997 sur le Trophée Jules Verne aux côtés d’Olivier de Kersauson, et son dernier, l’Arkea Ultim Challenge-Brest en solitaire en début d’année 2024 (deuxième place), Thomas Coville aura bouclé neuf fois le tour de la planète à la voile, 5 en solitaire, 4 en équipage, 7 en multicoque, 2 en monocoque. Avec réussite, puisqu’il a détenu le Trophée Jules Verne à deux reprises (1997 et 2010 avec Franck Cammas sur Groupama 3) et le record en solitaire en 2016 (49 jours, 3 heures et 7 minutes, battu l’année suivante par François Gabart).  « Thomas a une énorme expérience, c’est à la fois rassurant et un privilège de partager cette aventure avec lui, mais également un gage de performance, car il connaît les spécificités de chaque endroit », résume Frédéric Denis. Pour s’attaquer de nouveau au Trophée Jules Verne, « un défi unique et singulier », Thomas Coville, animé de « l’envie de se nourrir des autres », a choisi de s’entourer de six équipiers qui, eux, n’ont jamais fait le tour de la planète. « Tous ensemble, on rêve d’être Duplantis (Armand Duplantis, champion olympique et recordman du monde de saut à la perche) et de passer sous la barre des 40 jours. On a l’enthousiasme et l’émerveillement d’aller voler sur un bateau de cette dimension dans des endroits hostiles. Ce sont des moments dans lesquels les athlètes se subliment, on a envie de s’offrir cette transcendance commune et collective. »

 

Frédéric Denis, 40 ans

Né à Pithiviers (Loiret), Frédéric Denis a longtemps vécu dans la région nantaise, initié à la voile à Pornichet où il passait ses vacances et week-ends, « plutôt sur l’eau que sur la plage ». De la voile légère d’abord, du J80, du match-racing et le Tour Voile ensuite, avant de se lancer au large : « La course au large me faisait de l’œil, j’ai décidé de passer ma Mini d’abord, comme le dit le dicton ». Avec succès, puisque dès sa première année, « Freddy » remporte la Mini Transat 2015 en proto, preuve d’un talent certain. Entre-temps, il avait découvert le Team Sodebo qui l’avait accueilli pour son stage de fin d’études en électronique en 2010. Il y a deux ans, il revient dans l’équipe, après avoir notamment goûté à l’Imoca auprès d’Alan Roura (9e de la Transat Jacques Vabre 2017) et au Class40 avec Axel Tréhin (victoire sur la Normandy Channel Race en 2021). « Touche à tout » à bord de Sodebo Ultim 3, Frédéric s’attaque à son premier tour du monde, estimant que le Trophée Jules Verne, « c’est un peu un graal, un rêve qui s’accomplit », avant d’ajouter, à propos de la difficulté de l’exercice : « Il faut vraiment trouver le curseur entre aller le plus vite possible et garder le maximum du potentiel du bateau jusqu’au bout. » Et ce père de trois enfants de conclure : « J’attends particulièrement les grandes mers du Sud qu’aucune barrière ne freine, je suis à la fois impatient mais aussi un peu effrayé à l’idée de les rencontrer. »

 

 

Pierre Leboucher, 43 ans

Pierre Leboucher est un sportif dans l’âme, qui a commencé la voile en Optimist sur l’Erdre, à côté de Nantes, avant de suivre la filière classique du dériveur qui l’a mené jusqu’au 470. Il est deux fois vice-champion du monde et finalistes aux Jeux Olympiques de Londres en 2012 (7ème). « Je me suis alors dit qu’il y avait plein d’autres choses à faire et je me suis mis à la course au large. » Particulièrement au Figaro, dont il est devenu un pilier du circuit, remportant notamment la Sardinha Cup en 2022 et une étape de la Solitaire du Figaro. La porte de Sodebo Ultim 3 s’est ouverte cette année : « Je me suis senti mûr pour postuler », sourit celui qui se réjouit d’avoir « la chance de partir sur un premier tour du monde qui va me permettre de découvrir de nouveaux océans et décors, c’est palpitant ». Barreur/régleur, mais également en charge de la mécanique, du gréement et des voiles, l’ancien « olympien » mesure cependant la difficulté de la tâche, celle de se battre contre un chrono et non contre des adversaires : « On sait très bien qu’avant d’envisager le record, il faut arriver au bout, donc préserver le matériel. L’exercice consiste à ne pas l’utiliser à 300%, mais pas à 80% non plus, sinon tu risques de ne pas battre le record. Et sans concurrent à côté, c’est sans doute plus difficile de trouver la bonne cadence. » Le Nantais rappelle que la dimension humaine est un élément clé de la réussite : « Quand je regarde les hommes à bord et notre préparation, qui a permis de souder l’équipage, ça matche bien entre nous, je suis confiant. »

 

Léonard Legrand, 30 ans

Arrivé au sein du Team Sodebo en 2015 dans le cadre d’une alternance en électronique, Léonard Legrand n’en est depuis plus parti. En moins de dix ans, celui qui a commencé sur une planche à voile du côté de Saint-Cast est en effet parvenu à y faire sa place, occupant désormais la responsabilité du pôle électronique et informatique. Au-delà de cette expertise technique, son grand sourire et sa forte volonté lui ont permis, peu à peu, de sortir du cadre pour devenir un navigant à part entière. « En électronique, une partie du travail se fait en mer, puisqu’on doit calibrer les capteurs automatiques, valider les pilotes, voir comment Thomas utilise le bateau pour mettre les outils à sa main, ça nécessite donc de naviguer. Au début, je n’y connaissais rien, mais petit à petit, j’ai pris mes marques jusqu’à être utile à bord. » Son envie d’apprendre et de progresser l’a aussi amené depuis deux ans à naviguer à bord du trimaran Viabilis sur le circuit des Ocean Fifty. Séduit par l’enthousiasme de « Léo » – « on l’appelle Léonard quand on a quelque chose à lui reprocher », sourit Thomas Coville qui a été vite convaincu de l’embarquer pour cette tentative de Trophée Jules Verne. « Notre équipe et nos compétences se complètent. On a réussi à avoir le bon mélange à bord entre les techniciens/navigants membres du Team Sodebo, qui connaissent par coeur le bateau, et les marins qui viennent de l’extérieur et apportent leur expérience de la compétition, la précision des réglages. Ce mariage se fait très bien », souligne Léonard qui, en plus de barrer et régler le bateau comme les autres, gérera la partie électronique et aura la casquette de media man. Pour l’un des benjamins de l’équipage, « le Trophée Jules Verne, c’est ce qu’on peut imaginer de mieux en voile, c’est très fort sportivement, mais aussi humainement, il faut réussir à vivre à sept pendant 40 jours dans un espace de 6m². Ça peut faire peur, parce que ce n’est pas sans danger, mais c’est en même temps hyper grisant. »

 

 

Guillaume Pirouelle, 30 ans

Originaire de Normandie, Guillaume Pirouelle est un talent précoce qui, comme beaucoup, a fait ses armes en voile légère avec déjà de beaux titres : double champion d’Europe et double vice-champion du monde en 420. Il confirme en 470 (champion du monde jeune en 2015, vice-champion d’Europe en 2017), ce qui lui vaut d’être embarqué au sein du Team Beijaflore sur le Tour Voile, qu’il remporte en 2019. « Curieux de nature », il décide alors de se lancer en course au large, avec bonheur puisqu’il est sélectionné par la région Normandie pour succéder à Alexis Loison sur le circuit Figaro. Le Havrais frappe fort d’entrée, terminant deuxième (et premier bizuth) de sa première Solitaire du Figaro, en 2022. Des résultats qui lui valent d’être invité à faire un essai la même année sur Sodebo Ultim 3. « C’était inattendu parce que cela ne faisait que deux ans que je faisais de la course au large, mais je ne pouvais pas refuser. C’est un rêve de naviguer en Ultim et l’opportunité d’apprendre énormément de choses sur des machines ultra technologiques », commente celui qui est par ailleurs titulaire d’un diplôme d’ingénieur à l’INSA Rennes. Barreur/régleur à bord, également en charge de l’accastillage, de l’hydraulique et de l’avitaillement, Guillaume – le plus jeune de l’équipage – considère que « le Trophée Jules Verne est un défi hors norme. Pour moi, c’est le record ultime, très dur à battre, il faut réussir à tenir dans la durée, tant physiquement que mentalement. Ça fait un peu peur, mais on est chacun bien préparés, j’espère découvrir plein de choses et revenir avec des étoiles plein les yeux. »

 

Benjamin Schwartz, 37 ans

Dernier arrivé dans l’équipage, Benjamin Schwartz peut se targuer d’une solide expérience du large. Ce Lyonnais d’origine, qui s’est initié à la voile sur les lacs de sa région et en Méditerranée, a décidé d’en faire son métier à la fin de ses études en géologie appliquée, après de premières expériences notamment auprès de Lionel Péan et de François Duguet (aujourd’hui boat captain de Sodebo Ultim 3). Il intègre ensuite en tant qu’électronicien l’équipe technique de Dongfeng Race Team de Charles Caudrelier, vainqueur de la Volvo Ocean Race 2017-2018. Ce dernier lui suggère alors de se former sur le circuit Figaro, un conseil avisé, puisque Benjamin termine premier bizuth (et 6e au général) de la Solitaire du Figaro 2019, décrochant la même année le titre de champion de France Elite de course au large. Son talent, particulièrement de navigateur, en fait dès lors un équipier très recherché. Il découvre ainsi l’Imoca sur The Ocean Race Europe en 2021 auprès de Nicolas Troussel … qu’il retrouve donc à bord de Sodebo Ultim 3, avant d’être le skipper de Holcim PRB sur les dernières étapes de The Ocean Race 2023. Membre de l’équipage de Yann Guichard en 2018, l’exercice du stand-by et du Jules Verne, il connaît. « J’étais embarqué sur la tentative l’hiver 2018 – 2019 que l’on avait bien commencé mais malheureusement avortée en Australie sur casse d’une mèche de safran. Ensuite nous avons fait un an de stand-by, sans jamais partir. » Et puis récemment, on le retrouvait dans l’équipe de Charles Caudrelier. Ce dernier ayant renoncé à s’élancer en fin d’année sur le Jules Verne (démâtage), Thomas Coville a proposé à Benjamin Schwartz de relever le défi sur Sodebo Ultim 3. « Benjamin a montré ces dernières années que le Trophée Jules Verne était l’un de ses objectifs majeurs. Il a beaucoup travaillé sur ce sujet : la gestion du stand-by, le parcours, la météo. Il s’est préparé pour cet exercice complexe. Il va renforcer notre organisation du bord entre Nico et moi sur la partie navigation. C’était naturel de l’intégrer et cela me plaît de partir à 7. »

 

Nicolas Troussel, 50 ans

Originaire de la baie de Morlaix, Nicolas Troussel est, après Thomas Coville, le plus expérimenté de l’équipage de Sodebo Ultim 3, lui qui confie avoir « toujours voulu être professionnel dans le milieu de la voile ». Ce qu’il réussit à faire au début des années 2000 sur le circuit Figaro, qu’il marque de son empreinte en remportant la Transat AG2R en 2004 avec son copain de la baie, Armel Le Cléac’h, puis à deux reprises la Solitaire du Figaro, en 2006 et 2008. Suivent des expériences en Class40 (deuxième de la Route du Rhum 2010), sur le Tour Voile puis en Imoca, skipper de Corum L’Épargne. Si l’arrêt du projet en septembre 2023 est un coup dur pour « Nico », il ne reste pas inactif longtemps. Thomas Coville, qui avait déjà fait appel à lui en 2022 pour toutes les courses en équipage, lui propose en effet de faire partie de l’aventure du Jules Verne. « Comme il a été lui-même skipper d’un projet, Nico a la faculté de se mettre dans ma tête en prenant le lead à certains moments, j’ai tout de suite vu qu’il avait compris ce que j’attendais de lui », commente Thomas Coville. Chargé de la navigation en relation avec la cellule de routage à terre, le Finistérien ne cache pas sa motivation au moment de s’attaquer à son premier tour du monde en équipage. « Le Jules Verne, c’est le plus beau record à décrocher en tant que marin, on sait tous très bien qu’il est très dur à battre, mais ça le valorise d’autant plus et ça donne encore plus envie. »

 

 

Sur le banc des remplaçants

Basile Bourgnon, 22 ans, sort de trois saisons réussies sur le circuit Figaro, avec notamment une 2e place sur la Solitaire en 2023. Le fils de Laurent, qui a également couru en Class40 et sera en 2025 à la barre d’un Ocean Fifty, a navigué plusieurs fois sur Sodebo Ultim 3 cette saison, notamment lors du convoyage entre Antibes et Lorient.

François Duguet, 43 ans, est, avec Thomas Coville, celui qui connaît le mieux Sodebo Ultim 3 dont il est le boat captain. Il faisait également partie de l’équipage de la précédente tentative sur le Trophée Jules Verne, en 2020.

Le Trimaran SVR-Lazartigue en stand-by pour le Trophée Jules Verne

À partir de ce lundi 18 novembre, le Trimaran SVR-Lazartigue entrera officiellement en stand-by dans le cadre du Trophée Jules Verne, record du tour du monde sans escale et sans assistance. L’équipage skippé par François Gabart et composé de cinq hommes et une femme, guette les conditions météorologiques optimales pour s’élancer à l’assaut des 40 jours, 23 heures, 30 minutes et 30 secondes réalisés en 2017, par Francis Joyon et son équipage sur IDEC Sport.

 

 

Dimanche 10 novembre, ils étaient 40 à quitter les Sables d’Olonne pour entamer la 10e édition du Vendée Globe, tour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance, à bord d’IMOCA (monocoque de 60 pieds, soit 18,28 m). Dans quelques jours ou semaines, certains pourraient peut-être apercevoir dans leur rétroviseur la grande silhouette du trimaran SVR-Lazartigue. Skippé par François Gabart, ancien vainqueur du Vendée Globe (2012-2013), le géant des mers est en effet, à partir du lundi 18 novembre, entré en stand-by pour le Trophée Jules Verne, record du tour du monde à la voile, sans escale, et sans assistance. À bord, ils seront cinq hommes et une femme à partir à la conquête du Graal.

« L’esprit du Jules Verne, c’est de faire le plus beau tour du monde possible, de faire une belle navigation autour de la planète, avec forcément de la vitesse puisque c’est un record, explique François Gabart. Ça reste un défi technique et humain de voler autour de la planète. C’est passionnant. Je suis vraiment très heureux de partir pour cette aventure en équipage. »

Côté logistique, l’avitaillement est embarqué, à l’exception d’une petite partie de produits frais. Côté humain, les hommes et la femme de l’équipage sont sur le ponton prêts à partir. « Nous sommes prêts, mais s’il faut attendre, nous attendrons, poursuit le skipper. Nous avons évidemment beaucoup d’échanges avec la cellule de routage. La visibilité à partir de Ouessant pour descendre l’atlantique nord le plus rapidement possible est toujours assez bonne. Ce qui est plus difficile c’est de synchroniser ces premiers jours de navigation avec l’idée d’accrocher une dépression au large du Brésil et d’avoir un anticyclone de Sainte-Hélène le plus nord-est pour enchainer l’atlantique sud le plus vite possible. Au-delà de l’Équateur et après cinq ou six jours, les informations ne sont pas encore très précises d’autant plus dans une zone qui n’est pas toujours très stable. Notre philosophie est de partir dès que nous pourrons, de naviguer pour au moins générer un entrainement et si les choses s’alignent de poursuivre. Nous pouvons nous autoriser à partir et à revenir. Mais il faudra tenter. L’analyse des fichiers est bien évidemment très importante pour être bon, pour choisir la bonne fenêtre et ensuite bien naviguer mais impossible de maitriser les 40 jours. Malgré toutes les statistiques, il y a une part d’aléatoire. On peut faire une très belle navigation et tomber sur un système qui nous bloque. Il faut l’accepter. Ça fait partie du jeu, de la beauté mais aussi de la cruauté de notre sport. Il faut avoir de la réussite. D’autant plus sur un tour du monde. »

 

Le potentiel, l’envie et les compétences

Pour l’entourer, François Gabart a constitué un équipage d’une grande complémentarité avec de multiples compétences et expériences associées. « Un tel projet est avant tout une aventure humaine, estime le skippeur. Le Jules Verne c’est une étincelle. Il faut que tous aient cette formidable envie. Il faut ensuite amener des expériences et des compétences avec une palette variée. L’équipe me semble complète. On a l’expérience avec Pascal qui connait ces tentatives de Jules Verne et qui a une expérience extraordinaire au large. Des gens avec moins d’expérience comme Antoine (Gautier), Emilien (Lavigne) et plus récemment Amélie (Grassi) mais qui ont beaucoup de compétences. Ça amène aussi de la jeunesse et une énergie différente. Tom (Laperche) est un pilier du bateau. Il est le plus jeune mais a déjà une grande expérience et une maturité exceptionnelle. Ça fait un joli cocktail qui me semble bien équilibré. On a le potentiel, l’envie, les compétences. Je suis très fier de cet équipage. »

Six marins sur le Trimaran SVR-Lazartigue à la conquête du Trophée Jules Verne

Le Trimaran SVR-Lazartigue s’attaquera au Trophée Jules Verne, record du tour du monde à la voile, à la fin de l’année. Pour décrocher ce « Graal » de la course au large, ils seront six à bord. François Gabart, capitaine du bateau, sera entouré d’un équipage d’une grande complémentarité avec de multiples compétences et expériences associées.

 

© Qaptur

Le Trophée Jules Verne est sans aucun doute le record à la voile le plus mythique. Il est celui de l’absolu, celui du tour du monde en équipage, sans escale et sans assistance. L’obtenir c’est devenir le bateau le plus rapide autour de la planète et écrire une des plus belles pages de l’histoire de la course au large.

Depuis janvier 2017, et le passage de la ligne d’arrivée du trimaran IDEC mené par Francis Joyon, en 40 jours, 23 heures, 30 minutes et 30 secondes, plusieurs équipages ont tenté l’exploit. En vain. L’hiver prochain, le Trimaran SVR-Lazartigue se lancera à son tour à l’assaut de ce défi et coupera cette ligne reliant le phare de Créac’h sur l’île d’Ouessant et le Phare du cap Lizard. Avec l’ambition d’y revenir plus vite que l’actuel record. À bord, ils seront six à partager cette aventure unique où chaque émotion est exacerbée et poussée à son extrême. Cinq hommes et une femme à partager le même rêve ultime.

François Gabart, que vous inspire le Trophée Jules Verne ?

L’exercice du tour du monde reste extraordinaire alors le faire le plus vite possible, c’est ce qui se fait de mieux. C’est la dimension ultime. J’ai le même discours sur le Trophée Saint-Exupéry pour le record en solitaire. Dans le Jules Verne, il y a aussi cette notion d’équipe qui apporte quelque chose d’assez incroyable.

Comment avez-vous constitué votre équipage ? 

Il faut de la complémentarité des compétences mais aussi des tempéraments et des caractères. Je suis déjà confronté à ces optimisations à terre avec beaucoup de monde à gérer. Sur l’eau, c’est le même principe. Pour ce projet, il faut surtout des gens qui ont l’étincelle. Le Jules Verne c’est une étincelle. Il faut que tous aient cette formidable envie. Il faut ensuite amener des expériences et des compétences avec une palette variée. L’équipe me semble complète. On a l’expérience avec Pascal (Bidégorry) qui connait ces tentatives de Jules Verne et qui a une connaissance extraordinaire au large sur plein de bateaux différents. Des marins aux compétences techniques exceptionnelles comme Antoine (Gautier) et Emilien (Lavigne). Amélie (Grassi) a déjà navigué sur un Ultim (Actual), elle a l’enthousiasme et l’étincelle pour un tel projet. Ça amène aussi de la jeunesse et une énergie différente. Tom (Laperche) est un pilier du bateau. Il est le plus jeune mais a déjà une grande expérience et une maturité exceptionnelle. Cette aventure va aussi l’enrichir et c’est important pour le plus long terme. Ça va continuer à le rendre encore plus fort. Ça fait un joli cocktail qui me semble bien équilibré. À nous de faire en sorte que cette équipe murisse. On a le potentiel, l’envie, les compétences et une belle dynamique. Je suis très fier de partir avec cet équipage.

L’équipage est composé à la quasi-totalité de personnes qui se connaissent très bien. Est-ce indispensable ?

Nous allons être un temps assez long et dans un espace restreint, sur un bateau lancé à toute vitesse, avec tous les imprévus que cela implique. Il y aura des bons moments mais aussi des périodes plus délicates et des choses qui vont casser. On va être sous pression et sous stress. On le sait. Dans ces moments, l’humain est poussé dans ses retranchements. C’est bien de savoir où on peut aider les gens, là où il ne faut pas s’inquiéter ou alors porter davantage d’attention. Un tel projet est avant tout une aventure humaine.

 

© Qaptur

 

L’équipage en détails :

François Gabart : 41 ans. François est l’un des marins les plus talentueux de sa génération. Son palmarès est des plus impressionnants. Diplômé en génie mécanique et développement à l’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon, le skipper a entamé sa carrière en IMOCA avec de multiples succès et records. Après avoir notamment remporté le Vendée Globe en 2013 puis la Route du Rhum en 2014, il part dans l’aventure des bateaux géants de la catégorie Ultim en 2015 avec à nouveau de nombreux succès. Le dimanche 17 décembre 2017, au terme d’une aventure de 42 jours, 16 h 40 min et 35s, il termine son tour du monde en solitaire et établit un nouveau record du monde, un record toujours d’actualité.
Au sein de son entreprise MerConcept, il a imaginé et construit le Trimaran SVR-Lazartigue avec lequel il affiche déjà plusieurs records (traversée de la Méditerranée notamment) et plusieurs belles performances sur de grandes courses comme la Route du Rhum (2e en 2022) ou la Transat Jacques Vabre (2e en 2021 et 2023, associé à Tom Laperche).

Tom Laperche : 26 ans. Tom est l’étoile montante de la course au large. Champion du monde sur un petit dériveur à l’âge de 11 ans, Tom a réalisé sa première traversée de l’Atlantique à… 13 ans, en compagnie de son père Philippe. Diplômé de l’école d’ingénieur de l’université de Technologie de Compiègne, Tom a intégré le programme du Trimaran SVR-Lazartigue pratiquement dès son origine. Il a depuis participé à deux Transats Jacques Vabre associé à François Gabart et a pris le départ de l’Arkea Ultim Challenge en janvier dernier, première course autour du monde en solitaire pour les bateaux Ultim. Une avarie à la suite d’une collision a malheureusement mis fin à l’aventure, au large du Cap (Afrique du sud).

« Le Trophée Jules Verne, c’est historique. Ça donne forcément envie d’y aller. Gérer un bateau en équipe c’est très différent. Il y a déjà une grosse marche entre le solitaire et le double. Tu sais que tu peux compter sur une équipe. C’est attrayant de partager et vivre une telle aventure. La connaissance entre nous est importante. Un équipage ne doit pas être une somme d’individualités mais un groupe qui doit bien s’entendre. Il peut y avoir des désaccords mais il ne faut pas voir de blocage. Comme on se connait tous, ça va bien se passer. Nous sommes les cinq qui ont fait le plus de milles sur le bateau et on a toute confiance en Amélie qui rejoint l’équipe. C’est un atout de bien connaitre ce bateau, notamment techniquement, avec Antoine et Emilien qui font partie des équipes techniques depuis la conception du bateau. On pourra tout gérer en mer sans passer par la terre. Ça fait un équipage complet. Pour réussir, il y a beaucoup de secteurs dans lesquels il faut exceller. Et je crois que nous sommes assez complets et complémentaires. »

Pascal Bidegorry : 56 ans. Déjà champion du monde des multicoques ORMA en 2005, Pascal possède un des plus beaux palmarès de la voile avec des victoires dans très nombreuses courses, comme la Solitaire du Figaro (2000), la Volvo Ocean Race (tour du monde en équipage par étapes) en 2018, ou encore sur la Transat Jacques Vabre, une première fois en 2005, avec Lionel Lemonchois, puis en 2015, avec François Gabart. 2eme de la Route du Rhum en 2006 en multicoque ORMA. Il est aussi un homme des records. Parmi tous ceux qu’il a battus, il détient toujours depuis 2009 celui de la traversée de l’Atlantique nord en équipage, en 3 jours, 15 heures, 25 minutes et 48 secondes, à une moyenne de 32,94 nœuds et le record du monde à la voile en 24 heures. En 2011, il s’était attaqué au Trophée Jules Verne mais avait dû renoncer au 13e jour de mer après une collision avec un OFNI. Il fait partie de l’équipe du Trimaran SVR-Lazartigue depuis le début de l’aventure et a participé comme navigant au record de la Méditerranée et à la victoire sur la Drheam Cup en 2022.

« Avoir la chance une fois dans sa vie de naviguer une seule journée en Ultim c’est déjà sympa, alors partir faire le tour du monde, c’est génial. Il faut le prendre comme une chance de vivre quelque chose d’extraordinaire maritimement et humainement. Pour la plupart, nous nous connaissons depuis hyper longtemps. Nous avons une belle relation d’amitié, de respect et peut-être même de fraternité. C’est un des points forts de l’équipe. On sait que ça ne sera pas marrant tous les jours et que c’est un truc engagé. Chacun dans son secteur d’activité a beaucoup de savoir-faire et d’expérience. Ça reste un tour du monde et il se passe plein de choses. C’est une belle aventure humaine qui demande beaucoup d’engagement et de détermination. »

Amélie Grassi : 30 ans. Amélie affiche déjà une belle expérience. À la barre de La Boulangère Bio, elle vient de terminer The Transat à la 7ème place en Class 40. En 2021 et 2023, sur le même bateau, elle a participé à la Transat Jacques Vabre, associée la première fois à Marie Riou (9e) puis à Anne-Claire Le Berre (13e). En IMOCA, Amélie, basée à Lorient, a également navigué sur les deux premières étapes de la dernière édition de The Ocean Race, dans l’équipe Biotherm menée par Paul Meilhat. Une expérience de la navigation en équipage qui sera un atout dans cette aventure. Elle a aussi  participé à 4 courses en Ultim avec Actual.

« Quand le projet m’a été proposé, j’ai d’abord été surprise car je ne m’y attendais pas. Ensuite j’ai été honorée. Je n’ai pas mis longtemps à accepter. Le Trophée Jules Verne c’est un monument de la course au large. D’abord par le voyage. Faire le tour du monde ce n’est jamais anodin et pour moi ce sera une grande première. C’est surtout un défi sportif prestigieux et un record difficile à casser. Il faut de l’exigence, de l’excellence et de l’endurance pendant toute la durée du tour. Je suis hyper enthousiaste de me mesurer à ce défi mythique. Naviguer avec de tels marins sur une longue période sur un bateau comme le Trimaran SVR-Lazartigue qui est vraiment à la pointe de la technologie, de l’optimisation de la performance, c’est hyper réjouissant. C’est vertigineux et hyper excitant pour moi d’imaginer voler tout autour du monde à des vitesses pas possibles. L’équipage, ça te tire toujours plus haut et plus loin. Tu te dois de donner le meilleur pour tes équipiers et s’il y a un coup de mou, tu te raccroches à l’énergie des autres pour repartir. Ça va être une expérience exceptionnelle. Je me sens bien chanceuse d’embarquer dans cette histoire. »

Antoine Gautier : 43 ans. Directeur technique du projet Trimaran SVR- Lazartigue au sein de MerConcept, Antoine affiche une grande expérience de la voile. Neveu d’Alain Gautier (vainqueur du Vendée Globe 1992 entre autres grands succès), il a tout de suite baigné dans l’univers de la course au large. En 2011, il travaillait déjà sur le bateau vainqueur du Vendée Globe, skippé par… François Gabart. Récemment, à bord du Trimaran SVR-Lazartigue  il a participé comme navigant au record de la Méditerranée (13h55’ entre Marseille et Carthage, en mai 2022), et aux victoires sur la Rolex Fasnet Race 2023 (record à la clé) et sur la Drheam Cup 2022. Sa parfaite connaissance du Trimaran dans tous ses aspects sera un précieux atout.

« Le Jules Verne, c’est le Graal absolu, l’épreuve mythique, étrangers compris. Quelle que soit la classe, on dessine des bateaux avec la volonté de les rendre les plus rapides possible. Il n’y a pas mieux que de décrocher un Jules Verne. C’est le record le plus emblématique car tu sais qu’il n’y a pas un bateau plus rapide que le tien. Il y a de l’excitation mais aussi un peu d’appréhension car ce n’est pas anodin. Les mers du sud ça fascine. On a envie d’aller voir ce qui se passe là-bas. On sera très bien entourés à bord. Entre François, Pascal et Tom, il y a des légendes de la voile française et un sacré palmarès. Nous aurons aussi beaucoup de compétences complémentaires. C’est dur de rêver mieux. Je me sens privilégié, chanceux. »

Emilien Lavigne : 30 ans. Aujourd’hui ingénieur du bureau d’études de MerConcept et principalement responsable électronique, Émilien a intégré MerConcept en 2015, comme stagiaire, lors de la construction du Trimaran Macif. Alors qu’il n’avait pratiqué la voile légère que comme un loisir sportif, François Gabart lui a rapidement donné l’opportunité de naviguer, d’abord sur des sorties d’entraînement ou de convoyage, puis en course ou sur des tentatives de record. Récemment, à bord du Trimaran SVR-Lazartigue, il faisait partie de l’équipage du record de la Méditerranée (13h55’ entre Marseille et Carthage, en mai 2022), et lors des victoires sur la Rolex Fasnet Race 2023 (record à la clé) et sur la Drheam Cup 2022. Ses compétences en électronique sont louées par tous.

« C’est l’accomplissement de plusieurs années de projet et de travail autour d’un super bateau et d’une super équipe. Faire partie de l’équipage, ça me réjouit et m’excite. C’est mythique d’aller dans les mers du sud et de franchir tous ces caps. C’est un parcours qui m’a fait rêver depuis tout petit quand je suivais le Vendée Globe. Pour moi, c’était des légendes qui faisaient ces courses. J’étais loin d’imaginer faire une telle aventure, surtout accompagné de ces marins. Quand on fait la compilation de tout ce qu’on a à bord, c’est dingue. Je suis très conscient de la chance que j’ai d’embarquer sur ce parcours, avec ces personnes et sur ce bateau qui est une merveille. »

Vers de nouveaux horizons

Sails of Change ne partira plus cette année : le stand-by qui dure depuis plusieurs mois à Brest s’achève car les conditions météos n’ont pas été favorables cet automne, ni cet hiver … 

 

 

Ce sera pour une autre fois ! Sails of Change n’a pu s’engager sur ce parcours autour du monde cette année, tout comme d’autres prétendants. La raison se justifie par des situations météorologiques peu propices à un tour du monde à la voile : le Trophée Jules Verne n’est pas pour autant abandonné puisque l’équipage reste toujours prêt à en découdre.
Il faut bien arrêter le stand-by un jour !

« Nous effectuerons un retour en convoyage de Brest aujourd’hui pour retrouver notre base à La Trinité-sur-mer. Nous avons eu beau reculer notre stand-by, il n’y a jamais eu d’opportunités météorologiques … » précise Yann Guichard. « Nous avons poussé la date limite le plus possible, mais rien ne se présente encore ces prochains jours. Le problème n’est plus de franchir l’équateur en moins de cinq jours (le meilleur temps est toujours détenu par l’écurie en 4 jours 19 heures 57 minutes) mais d’atteindre la longitude du cap de Bonne-Espérance aux alentours de douze jours ! »

Francis Joyon et son équipage avaient en effet bénéficié de conditions très favorables dans les mers du Sud et il faut donc avoir du « gras » avant d’entamer l’océan Indien. « C’est une décision difficile mais il faut bien arrêter un jour et passer à autre chose. Il y a forcément de la déception et il faut envisager la suite. Avec Dona (Bertarelli), nous avons rassemblé l’ensemble des navigants et des membres de l’équipe technique ce mardi midi : ce fut un moment fort ! »

« Cela fait dix ans que nous préparons ce Trophée Jules Verne, et à chaque fin de tentative ou de stand-by, il faut savoir tourner la page … L’émotion reste intacte et c’est toujours aussi difficile ! Ce que nous avons construit avec toute une équipe autour de nous ne peut se déliter » partage Dona Bertarelli.

Il faut bien comprendre que dans le Grand Sud, ce sera désormais l’automne, donc des dépressions plus rapides, plus violentes, des nuits plus longues, et des mers plus hachées ne permettant pas de naviguer à des vitesses permettant d’envisager de battre le record. Et de plus cette année, des icebergs dérivant plus haut en latitude, « dans le Pacifique ». Il aurait donc fallu augmenter la distance à parcourir … Sans pour autant que le temps à battre diminue. « Le record reste. Même s’il est battu, il y aura toujours quelqu’un pour l’améliorer un jour ! C’est cela la beauté d’un record … » déclare le skipper de Sails of Change.

Dorénavant, l’équipe se prépare pour une nouvelle saison de compétitions en TF35 qui vont débuter dès la mi-mai sur le Léman.

L’Atlantique sud toujours en ligne de mire

Yann Guichard, en collaboration avec Benjamin Schwartz et Jean-Yves Bernot, routeur, continuent de guetter la moindre opportunité d’un départ du Maxi-trimaran Sails of Change. Mais force est de constater que la situation actuelle n’est pas à la hauteur du Trophée Jules Verne pour espérer atteindre le Cap de Bonne Espérance aux alentours de 12 jours et se positionner sur le temps de référence du record à battre détenu par IDEC Sport*.

 

 

Le grand beau temps accompagné d’un vent faible d’Est qui règne sur la France en ce début de mois de février est trompeur. « La situation est atypique », explique Jean-Yves Bernot. « L’anticyclone centré sur la France pourrait permettre de partir avec un vent d’Est à la rencontre d’un front et de basculer ensuite vers le Sud ». De fait, les routages de ces dernières 48 heures vers l’Équateur sont bons avec 5 jours prévus pour atteindre les portes de l’Atlantique Sud, malgré « un alizé pas idéal ». Mais c’est ensuite que ça se gâte : « On a beau faire tourner tous les routages que l’on veut et même forcer un peu les polaires, le Sud ne passe absolument pas » garantit Benjamin Schwartz, navigateur de Sails of Change, en lien permanent avec Yann Guichard et Jean-Yves Bernot. Très étendu en longitude comme en latitude, l’anticyclone de Sainte-Hélène fait clairement barrage sur l’Atlantique Sud et rallonge considérablement la route pour rejoindre les dépressions de l’océan Indien, comme l’ont d’ailleurs montré les trajectoires des concurrents de The Ocean Race ces jours derniers. « Sans possibilité de traverser l’anticyclone, les meilleurs temps que l’on peut espérer à Bonne Espérance sont de 13 jours » ajoute Benjamin. C’est 24 heures de trop par rapport au temps de Francis (Joyon) ».

Rappelons qu’IDEC Sport avait ensuite enchaîné un océan Indien remarquable qui oblige aujourd’hui à capitaliser sur l’Atlantique sous peine de courir après le chronomètre tout le reste du tour du monde. Prolongé jusqu’à fin février, le stand-by de Sails of Change doit permettre de profiter de meilleurs enchaînements pour une descente Atlantique de premier ordre.

L’équipage de Gitana 17 a tenté sa chance hier dimanche. « L’Atlantique Nord est bon et ils ont des capacités de vitesse et une agilité dans les vents faibles de l’anticyclone que nous n’avons pas » explique Benjamin Schwartz. « En ce qui nous concerne, on a essayé de forcer un peu mes polaires du bateau mais le bilan, c’est que ça ne passe pas. Nous avons encore 20 jours de stand-by, nous restons sur notre objectif avec le potentiel de notre maxi-trimaran ».

 

*Record du Trophée Jules Verne détenu en 2017 par l’équipage de IDEC Sport en 40 jours 23 heures 30 minutes et 30 secondes.

Le Maxi Edmond de Rothschild contraint de rentrer à Lorient

Parti de Ouessant ce dimanche en début d’après-midi pour une nouvelle tentative sur le Trophée Jules Verne, le record du tour du monde à la voile, l’équipage du Maxi Edmond de Rothschild annonce ce soir faire demi-tour et regagner son port d’attache lorientais pour réparer une avarie survenue sur un élément de sa génératrice (moteur). Si cette dernière ne sert naturellement pas dans la propulsion du géant de 32 mètres, elle est cependant essentielle pour assurer la recharge des batteries et ainsi toute l’autonomie nécessaire aux six membres d’équipage sur une aventure planétaire.

 

 

Face à cette casse technique atypique, qu’ils ne peuvent en aucun cas résoudre en mer, Charles Caudrelier, Franck Cammas et leurs quatre équipiers n’ont malheureusement d’autres choix que de stopper leur tentative pour revenir à Lorient au plus vite. L’objectif étant désormais de réparer pour pouvoir se remettre en attente d’une fenêtre météo favorable dans les plus brefs délais. Pour rappel, le Gitana Team avait annoncé un stand-by jusqu’à fin février, début mars, ce qui laisse, espérons-le, encore de belles opportunités.

Le Trophée Jules Verne devant les étraves du Maxi Edmond de Rothschild

Après avoir largué les amarres à Lorient au petit matin ce dimanche, le Maxi Edmond de Rothschild a franchi la ligne de départ du Trophée Jules Verne, au large de l’île d’Ouessant, à 14h09m30s (heure française) . À la barre du géant volant de 32 mètres, Charles Caudrelier, Franck Cammas et leurs quatre équipiers s’élancent à l’assaut du prestigieux chronomètre autour du monde. L’objectif : battre le record de 40 jours, 23 heures et 30 minutes établi en 2017 par Francis Joyon et les hommes d’IDEC. Afin d’y parvenir, les marins du Gitana Team devront être de retour au large de Brest et du Phare du Créac’h avant le 25 mars à 13h 38m59s (heure française). Bien que singulière, la fenêtre météo qui se présente devant les étraves du Maxi Edmond de Rothschild mérite d’être tentée car elle pourrait bien permettre à l’équipage aux cinq flèches de saisir de belles opportunités.

 

 

Une fenêtre loin des standards 

Depuis vendredi matin, les skippers du Maxi Edmond de Rothschild et leur routeur, Marcel van Triest, envisagent une sérieuse opportunité de déclencher le chronomètre planétaire. Mais de fichiers en fichiers, de nombreuses divergences n’ont pas facilité le choix – toujours délicat – de la cellule météo. Fidèle à sa philosophie audacieuse et engagée, c’est finalement ce dimanche en début d’après-midi, que le grand trimaran volant armé par Ariane et Benjamin de Rothschild s’est élancé pour le record iconique de la course au large et le grand vertige qu’il procure.

Tous les membres du Gitana Team admettent, à l’instar de Charles Caudrelier, que « la fenêtre météo est un peu atypique ». Le dernier vainqueur de la Route du Rhum-Destination Guadeloupe explique : « si nous avons une idée très précise de ce qui peut se passer dans l’Atlantique Nord, c’est moins le cas dans l’Atlantique Sud. Une dépression au sud du Brésil est un peu incertaine en fonction des modèles ». En somme, il faudra passer par « un trou de souris » dixit Morgan Lagravière et « avoir un peu de chance sur les enchaînements météos », poursuit Franck Cammas. Les premiers jours de mer en revanche sont bien identifiés avec « du près pour débuter et un front à aller chercher demain », souligne Erwan Israël. Si l’enchaînement s’avère ensuite moins favorable, l’équipage se réserve le droit de faire demi-tour à la latitude des Canaries pour revenir chercher une meilleure rampe de lancement à la pointe bretonne.

Concentrés, déterminés et particulièrement enthousiastes, les six membres de l’équipage du Maxi Edmond de Rothschild débutent ainsi la 1ère tentative de l’année, la 3e du plan Verdier après deux campagnes avortées, en 2020 et en 2021. La dernière s’était achevée après 12 jours de course à l’entrée des mers australes alors qu’ils étaient en avance sur le record et venaient de signer le meilleur chrono de tous les temps au cap des Aiguilles. Certes, si ce départ à la mi-février peut apparaître comme avancé dans la saison, certains se sont élancés plus tardivement, à l’instar de Sport-Elec (Olivier de Kersauzon, le 8 mars 1997) et d’Orange II (Bruno Peyron, le 2 mars 2002).

 

 

Désormais, Charles Caudrelier, Franck Cammas et leurs équipiers ont les yeux rivés sur les points de passage, notamment au large de l’Afrique du Sud. « On se doit d’avoir au moins 24 heures d’avance sur le passage au Cap de Bonne Espérance de Francis Joyon (12 jours, 19 heures) », souligne Charles. Les objectifs sont donc bien identifiés et le contre-la-montre est plus que jamais lancé !

 

Les chiffres à retenir

Franchissement de ligne : le 12 février 2022 à 14h09m30s (heure Fra), 13h09m30s TU
Date limite d’arrivée pour battre le record : le 25 mars 2023 à 13h38m 59s (heure Fra), 12h38m59s TU
Record à battre :  40 jours, 23 heures et 30 minutes > Record détenu par Francis Joyon et son équipage (Idec Sport) depuis le 26 janvier 2017.

 

Ils ont dit

Charles Caudrelier : « C’est une fenêtre un peu atypique mais on arrive en fin de stand-by, on a envie de tenter notre chance, d’autant que les fichiers donnaient des bons temps de passage hier soir. Si on a une idée très précise de ce qui peut se passer dans l’Atlantique Nord, c’est moins le cas dans l’Atlantique Sud. Il y a une dépression au sud du Brésil qui est un peu incertaine en fonction des modèles. Mais nous avons décidé que ça valait le coup d’essayer, même si on doit faire demi-tour si ce n’est pas le cas. L’objectif, c’est d’aller le plus loin possible. Une des zones où on peut gagner le plus de temps par rapport au précédent record, c’est dans l’Atlantique. On se doit d’avoir au moins 24 heures d’avance sur le passage au cap de Bonne Espérance de Francis Joyon (12 jours, 19 heures). Il avait mis la barre très haut et on sait que son record sera difficile à aller chercher. Le plus dur dans ce record, c’est d’arriver à terminer avec un bateau à 100 %. Mais on pense que le Maxi Edmond de Rothschild est arrivé à maturité ! »

Franck Cammas : « C’est la première fois que nous franchissons la ligne de départ cette année. Nous savons que pour réussir ce record, il est important d’avoir un peu de chance sur les enchaînements météos. Les journées qu’on perdra lors de la première phase pourraient être rédhibitoires pour le record.  C’est pour ça qu’on a mis du temps à partir. On ne peut pas perdre de temps, d’autant que le record de Francis (Joyon / IDEC – ndlr) est très bon dans l’hémisphère sud ! Les records, pour les battre, il faut les tenter avant tout. »

Morgan Lagravière : « Je n’avais pas vraiment d’inquiétude sur le fait qu’on parte. Quand on voit la dynamique dans laquelle sont toujours Charles et Franck, on savait qu’on allait y aller. C’est un moment fort, un moment aussi d’éloignement de la famille, donc il y a pas mal d’émotions et de sentiments qui se partagent dans la tête. Mais c’est globalement très positif. Après, on garde la tête froide car on sait qu’il y a pas mal d’incertitudes dans cette fenêtre-là. On a vraiment envie d’aller dans les mers australes. C’est une case que je n’ai pas encore cochée dans ma carrière. Le bateau est exceptionnel, l’équipage est top : ce sont de très bonnes conditions pour prendre du plaisir et vivre cette expérience unique. On va croire en notre bonne étoile pour avoir les planètes qui s’alignent aussi au niveau de la météo. »

David Boileau : « Bien sûr, on est dans un état d’esprit conquérant ! Ça fait un mois et demi qu’on attend et on est forcément très contents de partir. Pour nous tous, c’est une forme de libération. Nous savons que la fenêtre n’est pas formidable mais on va y aller, on va tenter notre chance. Si la météo s’avère moins bonne, on fera demi-tour et on attendra pour la suivante. Mais ça bouge, ça donne envie de se faire plaisir et de tout donner ! »

Erwan Israël : « Ce n’est que la deuxième fois que je me change dans le bateau depuis le début du stand-by (rires) ! Finalement, on n’avait jamais vraiment envisagé un départ. Cette fois, c’est la bonne ! Forcément, on en a tous un peu marre de cette période de stand-by, de regarder la météo… Là, on est ravi, on a tous le sourire et on y croit. Même s’il y a des incertitudes, l’Atlantique Nord est plutôt bon, la fenêtre météo est intéressante, on va faire du près et chercher un front demain donc ça rend le challenge encore plus sympa ! »

 

Trophée Jules Verne : le Maxi Edmond de Rothschild met le cap vers la ligne de départ

Charles Caudrelier, Franck Cammas et leur équipage ont quitté le port de Lorient, ce dimanche 12 février au lever du jour, pour rallier la ligne de départ du Trophée Jules Verne, au large de l’île d’Ouessant. En stand-by depuis fin décembre, les hommes du Maxi Edmond de Rothschild ont décidé de tenter leur chance même si la fenêtre météo s’avère atypique. Le Gitana Team s’apprête à relever un sacré challenge : battre le fameux record établi par IDEC (2017) en 40 jours, 23 heures et 30 minutes. Le passage de ligne, moment toujours exaltant et riche en émotions, est prévu à la mi-journée ce dimanche. L’horaire sera affiné lors du convoyage vers Ouessant en concertation avec Marcel van Triest, le routeur de l’équipe aux cinq flèches.

 

 

C’est le début de la grande aventure, d’une course contre-la-montre qui débute enfin sur l’océan et d’un des défis les plus exaltants de la planète voile. Charles Caudrelier et Franck Cammas, deux des palmarès les plus fournis de la discipline, accompagnés par leurs quatre équipiers, s’apprêtent à tenter de battre le Trophée Jules Verne, le record absolu à la voile autour du monde sans escale et sans assistance.

 

Une fenêtre singulière aux allures de coup de poker

Avant, il a fallu faire preuve de patience, étudier avec soin l’évolution des conditions, déterminer l’enchaînement météorologique favorable entre l’Atlantique Nord et l’Atlantique Sud. Le stand-by avait débuté le 22 décembre dernier, quelques semaines à peine après la victoire de Charles Caudrelier lors de la Route du Rhum – Destination Guadeloupe. Depuis vendredi, les réunions ont été plus nombreuses entre les hommes du Gitana Team et leur routeur, Marcel van Triest. Une fenêtre s’est, en effet, dessinée pour s’élancer depuis la pointe bretonne. Sauf que cela ne relève pas de l’évidence. Après avoir longtemps tergiversé – le scénario s’est avéré moins pertinent samedi matin – la situation s’est retournée ces dernières heures, conduisant au départ du Maxi Edmond de Rothschild ce dimanche matin de son port d’attache lorientais.

 

 

Certes, l’équipe tente un véritable coup de poker, d’autant que la fenêtre est atypique. « Il est de toute façon quasiment impossible d’avoir un scénario idéal », répétait ces dernières semaines Charles Caudrelier. Si l’Atlantique Nord parait très favorable, la porte ouverte dans le Sud est moins évidente. Tous savent qu’il faudra aussi, en plus d’une abnégation à toutes épreuves, ce zeste de chance et de réussite pour faciliter leur progression au large.

 

 

Un record se construit ainsi et tout l’équipage en a bien conscience en quittant les pontons de Lorient ce dimanche matin. Les pulsations se sont accélérées, les visages sont devenus un peu plus tendus et l’excitation s’est mêlée à une concentration accrue. Il y a peut-être, au bout de cette aventure à se donner sans compter, l’occasion d’écrire l’histoire. Tous ont en tête la marque du précédent record, établi en 2017 par Francis Joyon et ses hommes suite à un enchainement de conditions exceptionnelles :  40 jours, 23 heures et 30 minutes en 2017.

 

Le Maxi Edmond de Rothschild poursuit son stand-by à Lorient

Après avoir regagné la Marina du château de Brest vendredi dernier pour un potentiel départ, l’équipage du Maxi Edmond de Rothschild a repris la mer ce mercredi matin et sera de retour à Lorient dans la journée suite à une sortie d’entraînement au large. La complexité à trouver le bon enchaînement entre l’Atlantique Nord et l’Atlantique Sud ne permet pas encore aux hommes du Gitana Team d’apercevoir le bon timing pour s’élancer sur le Trophée Jules Verne. Mais Charles Caudrelier, Franck Cammas et l’ensemble du Team restent vigilants et particulièrement attentifs à l’évolution des conditions.

 

 

Ça bloque au Sud 

La décision a été prise vers 22h30, hier soir. Après avoir envisagé un départ dans les 24 heures, l’équipe, en conformité avec l’analyse du routeur et météorologue Marcel van Triest, a décidé d’y renoncer pour le moment. « La météo ne nous convient pas assez », reconnaît Charles Caudrelier. « Francis Joyon a placé la barre très haut avec son record (40 jours, 23 heures et 30 minutes en 2017). Même si le potentiel d’Edmond de Rothschild est très bon, il faut trouver un enchaînement météorologique très favorable et très rare qui soit propice à la fois dans l’Atlantique Nord et dans l’Atlantique Sud. C’est la rampe de lancement d’une tentative et si elle n’est pas réussie, les chances de battre le record sont quasiment nulles. » L’objectif n’a pas varié : passer sous l’Afrique du Sud et le cap de Bonne-Espérance en moins de 11 jours.

Depuis samedi dernier, l’équipe tente de « trouver une correspondance entre ce qui se passe au Nord – notamment dans le golfe de Gascogne – et une dépression dans l’Atlantique Sud qui nous propulserait dans les mers australes, » poursuit Franck Cammas. « Pour l’instant, quand le timing du Nord est bon, celui du Sud n’est pas bon ». Dimanche, lundi et mardi, ce sont les effets de la tempête Gérard, qui a balayé l’Hexagone, qui rendaient impossible un potentiel départ. « On n’a pas voulu prendre de risque pour le bateau avec une mer très grosse sur les premières heures », confie Charles.

 

 

« La patience, c’est le jeu du record ! »

« On vise une dépression au large du Brésil mais il faut 7 à 8 jours pour y parvenir », précise le récent vainqueur de la Route du Rhum – Destination Guadeloupe. « Mais les prévisions changent beaucoup dans cette zone-là… Ce que nous cherchons, c’est attraper la bonne dépression avec une vitesse adéquate au potentiel du bateau qui puisse nous emmener jusqu’à l’océan Indien », abonde Franck. « Pour l’instant, à chaque fois que l’on approche d’un scénario, les modèles évoluent et ce n’est pas encore favorable ». Pourtant, celui qui a déjà signé le record en 2010 souligne « qu’il y a des opportunités qui peuvent arriver assez vite »

Ce mercredi matin, l’équipage a quitté la marina du château et la rade de Brest pour regagner sa base à Lorient. « Nous nous étions positionnés à Brest parce qu’il y avait une fenêtre entre deux vents tempétueux de Nord-Ouest », explique Franck. « Ce n’est plus le cas donc nous rentrons à Lorient. Nous allons en profiter pour partir comme si on prenait un départ », ajoute Charles. « Nous allons pouvoir confronter le bateau pendant quelques heures à de la mer forte afin de voir comment il se comporte. Avec le Maxi Edmond de Rothschild, on sait qu’on peut très rapidement venir à Brest dès qu’une opportunité se présentera ». Les deux marins avouent une « petite frustration » mais tout comme leurs quatre équipiers – Morgan Lagravière, David Boileau, Erwan Israël et Yann Riou – ils connaissent parfaitement les aléas d’une tentative de départ sur le Trophée Jules Verne et savent prendre les opportunités qu’offrent la météo comme elles viennent : « Nous aimerions partir le plus tôt possible, mais nous avons de l’expérience. On sait que le record est dur à battre et qu’il faut savoir être patient. C’est le jeu du record ! », concluait le skipper du Maxi Edmond de Rothschild juste avant de larguer les amarres, direction Lorient.

Yann Guichard : “Pourquoi j’avais envie de partir…”

Depuis le milieu de la semaine, l’équipage du maxi-trimaran Sails of Change guette la fenêtre météo qui s’est présentée aujourd’hui samedi sur l’Atlantique Nord. Une première opportunité de départ que Yann Guichard a eu envie de saisir, même si elle restait pleine d’incertitudes.

 

 

Yann Guichard comment qualifierais-tu la fenêtre qui se présentait jusqu’à ce samedi 14 janvier ?
« Elle était excellente jusqu’à l’Équateur où les routages nous plaçaient autour de cinq jours. Mais ensuite il n’y avait pas de système dépressionnaire favorable pour enchaîner sous l’alizé, atteindre Bonne Espérance avant 13 jours et se positionner sur le temps de référence du record à battre. »

 

Dans ton for intérieur, as-tu pensé qu’il fallait partir ?
« C’était la première opportunité de départ depuis le début de notre stand-by. Tout l’équipage a évidemment très envie de partir, mais celle-ci n’était pas favorable. Nous sommes mi-janvier, avec plus d’un mois de stand-by restant. C’est là toute la démonstration de la complexité de la quête du record autour du monde. Ce Trophée Jules Verne est résolument l’un des challenges les plus difficiles à relever. »

 

Yann Guichard et les 10 membres de l’équipage du maxi-trimaran Sails of Change restent très attentifs, concentrés et motivés.