Depuis le début du stand-by du maxi-trimaran Sails of Change le 24 octobre dernier, le code rouge rythme invariablement les journées pour le team de Yann Guichard et Dona Bertarelli. Une situation météorologique inédite décryptée avec le routeur Jean-Yves Bernot.
Posté à Brest depuis le 10 novembre, pour être le plus réactif possible à l’annonce d’un changement de code, le trimaran qui par quatre fois déjà s’est attaqué au Trophée Jules Verne, tire toujours sur ses amarres. Rouge sur rouge, rien ne bouge comme dit l’adage des navigateurs. Le fameux code qui régit les stand-by n’a jamais changé de couleur depuis cet automne. « L’an dernier, nous ne sommes pas partis » raconte Jean-Yves Bernot, « mais certaines situations pouvaient être tentantes, même si les enchaînements n’étaient pas prometteurs. Cette année, pas une seule journée n’a laissé la place au doute … »
Globalement, deux grandes familles de situations peuvent être propices pour s’élancer sur un Trophée Jules Verne. A l’arrière d’une dépression Atlantique en utilisant la bascule au Nord-Ouest pour descendre vers le Sud dans un portant musclé. Ou bien sur le dos d’un anticyclone hivernal campé sur l’Europe, synonyme de vents d’Est favorables. « Cette année – poursuit Jean-Yves – les dépressions ne présentent jamais de bascules franches, le vent reste calé au Sud Ouest. Et lorsque début décembre, la vague de froid a touché la France, l’anticyclone était positionné d’une telle manière qu’il barrait la route jusqu’aux côtes marocaines … Surtout, ces schémas s’installent à chaque fois durablement. En météo, on appelle ça des situations bloquées ».
Pour espérer battre le temps record détenu par IDEC Sport (40 jours, 23 heures, 30 minutes), on sait notamment qu’il faut être très percutant sur l’entame Atlantique et soigner tous les enchaînements jusqu’à accrocher les premières dépressions australes. « IDEC Sport a fait un temps canon sur l’Indien, un Pacifique correct et une excellente fin de parcours décrypte le routeur. Le tronçon sur lequel on peut réellement améliorer sa performance, c’est l’Atlantique. Si tu as deux jours de retard à Bonne Espérance, c’est fichu. On a fait tourner 2000 simulations, il y en a quatre qui passent à l’arrivée ! »
En résumé, rien ne sert de s’élancer à l’assaut d’un record aussi exigeant avec comme seule certitude une entame très défavorable. La question reste donc de savoir jusqu’à quand attendre. Si aucune date officielle de fin de stand-by n’a été fixée par l’équipage du maxi-trimaran Sails of Change, le cycle des saisons dicte sa loi. Sans parler des nuits qui s’allongent très rapidement à partir de février sous les hautes latitudes, le routeur de Sails of Change prévient des dangers du grand Sud dès l’automne austral : « C’est comme comparer la situation chez nous entre fin septembre et fin octobre, ce n’est plus du tout la même ambiance. Dans le Sud à partir de mi- février ça peut devenir des navigations « cow boy » … Surtout, les vents sont tellement forts que tu ne peux même plus aller vraiment vite en multicoque … »
Il reste donc quelques semaines pour résoudre cette année la complexe équation du Trophée Jules Verne. Yann Guichard, armateur et skipper du maxi Sails of Change précise : « Le stand-by du maxi Sails of Change est prévu jusqu’au 15 février, date au-delà de laquelle il est plus complexe de partir en raison de la fin de l’été et des systèmes de dépressions dans le Grand sud. On a une fenêtre d’un peu plus d’un mois devant nous, on reste très optimiste car la situation peut évoluer ».
Une équation régie par dame Nature qui en est aussi l’inconnue …